Comme les cadeaux

Homélie du frère Philippe pour le quatrième dimanche d’Avent

De tous temps, l’homme a cru pouvoir se concilier les ou la divinité par des offrandes, des sacrifices, ou en payant de sa personne – directement en se sacrifiant, ou indirectement en offrant ses prémices de la terre, de son troupeau, parfois son propre enfant… pour se garantir la protection d’en-haut, pour s’assurer de la bienveillance divine.

Et à peine lui arrivait-il un malheur qu’il pouvait se rebeller : « Mais qu’est-ce que j’ai fait au Bon Dieu pour en arriver là… ? » peut-on encore entendre aujourd’hui… Et combien se sont éloignés de Dieu qui ne répondait pas à leurs demandes, sourd à leurs intercession, absent dans leurs supplications.

Cela pose ; bien sûr, la question de notre relation à Dieu, de nos intentions lorsque nous nous adressons à lui : intéressées ou désintéressées… D’expérience, nous-même nous méfions des formules flatteuses, des cadeaux intéressés qui cachent toujours une intention, dissimulent mal une attente, un retour, une réponse et qui sont rarement gratuits… Cela nous rend méfiants… et non confiants…

Il en est de même avec Dieu, lorsque la relation est faussée parce qu’intéressée… La méfiance venant de nous plutôt que de lui qui fait toujours confiance à l’homme, qui croit toujours en l’homme. Et notre méfiance ne peut pas induire une relation franche, saine.

Je ne dis pas que les sacrifices, les privations, les offrandes, les prières sont inutiles… mais tout cela est beaucoup plus efficace lorsque c’est offert dans un but désintéressé… Comme les cadeaux – pensons-y en ce temps de Noël où nous allons en échanger -… ils n’en seront que plus justes et appréciés s’ils sont gratuits, désintéressés, offerts en geste de reconnaissance, de gratitude, de bienveillance.

Apprendre le désintéressement, entre nous, avec Dieu pour entrer dans la gratuité de la relation, voilà qui nous ramène à l’essentiel… et qui nous simplifie considérablement la vie. 

Ce n’est pas nous qui pouvons faire quelque chose pour Dieu, même si l’intention est bonne, C’est Dieu qui veut réaliser pour nous des merveilles. C’est la leçon qui se dégage des lectures de ce 4ème dimanche de l’Avent.

Le roi David, reconnaissant à Dieu qui l’a choisi, béni et comblé malgré ses erreurs de parcours, souhaite légitimement lui offrir une demeure digne pour l’Arche d’Alliance.

À quoi bon, une demeure sur la terre pour celui qui règne dans les cieux ? Il sera vite à l’étroit comme chaque fois que nous tentons de l’enfermer… même dans un palais… ou une Église…

En réponse, c’est le Seigneur qui prend l’initiative. Une maison, oui, mais de chair… une descendance issue de toi, un successeur…  Promesse de vie… Dieu promet et tiendra promesse… 

Et voici que Dieu qui avait jeté son dévolu sur David, en le faisant chercher de derrière les troupeaux, le jette à nouveau sur Marie, jeune fille de Nazareth : ‘Tu as trouvé grâce auprès de Dieu’ lui dit l’ange. C’est elle qui va mettre au monde la descendance promise à David.

Marie, tout accueil à la grâce qui lui est faite, n’en est pas moins étonnée, mais elle consent, simplement, naïvement, spontanément, à ce projet qui la dépasse et dont elle ne sait pas encore qu’il la mènera au pied de la croix et lui transpercera l’âme… Mais elle est confiante… totalement confiante… d’une confiance qui jamais ne la quittera désormais.

C’est en cela qu’elle est modèle pour notre foi : une confiance inébranlable, malgré les vicissitudes de la vie. C’est l’acte de foi que le Seigneur attend de nous pour accomplir en nous son œuvre et la mener à bonne fin.

Frères et sœurs, retenons la leçon d’aujourd’hui :

Ce ne sont pas nos efforts, nos sacrifices, nos privations, nos supplications qui nous attireront les bonnes grâces de Dieu, c’est le consentement à l’œuvre de sa grâce et à son action en nous.

Dieu nous devance, son amour et sa grâce nous précèdent, nous sont déjà acquis : nous sommes juste invités à y consentir et à les accueillir dans la confiance et dans la foi qu’entre les mains de Dieu, rien de mal ne peut nous arriver.

Ne cherchons pas à faire plus ou mieux par nos efforts pour le Seigneur… Accueillons, simplement, humblement comme Marie, la grâce qu’Il nous fait d’accomplir sa promesse en notre humanité, de rejoindre notre humanité, de venir demeurer au milieu de nous : Emmanuel ! Dieu avec nous !

Comme Marie, laissons-nous couvrir par l’Esprit Saint, réfugions-nous à l’ombre divine, et laissons advenir la Parole de Dieu en notre chair : laissons-la façonner notre cœur, l’habiter, le convertir, pour en témoigner en paroles et en gestes d’amour : témoins de l’Amour reçu, acteurs de l’Amour partagé.

Oui, c’est Dieu qui promet et tient promesse… Comme il a appelé David et Marie, il nous a appelés du néant à la vie, de notre médiocrité à sa grâce, de nos ténèbres à son admirable lumière que nous allons contempler en Jésus. Et comme le rappelait saint Paul aux Thessaloniciens : « Il est fidèle, Celui qui vous appelle : tout cela, il le fera. » I Th 5, 24.

fr. Philippe Jeannin

Annonciation, église de la Dormition à Jérusalem (photo : fr. Philippe Jeannin)

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