Corps - chair - sentiments

Aujourd'hui, Jésus institue le sacrement par lequel il veut jusqu'à la fin des temps nous donner son corps en nourriture : "Faites ceci en mémoire de moi" (1 Co 11,24).

Aujourd'hui, Jésus lave les pieds de ses disciples et leur demande de le faire à leur tour : "Faites vous aussi ce que j'ai fait pour vous" (Jn13,15).

Mais aujourd'hui, en ce jeudi saint 2020, pour raisons de pandémie, il ne nous est pas possible de faire ce que Jésus nous demande : nous nourrir de son Corps. Pour la même raison, il ne nous est pas possible non plus, à nous moniales qui en avons la tradition, de refaire le geste du lavement des pieds en communauté en signe du service qu'exerce la prieure auprès de ses sœurs.

Le Christ a pris un corps humain pour pouvoir nous nourrir et nous toucher ; il a institué l'Eglise pour qu'elle prolonge ce contact et sa présence physique au milieu de son peuple par les sacrements. Et comme nous en avons besoin, justement aujourd'hui !

Cependant, "le Verbe s'est fait chair" : c'est plus que se faire corps. Au sens biblique, la chair c'est la personne dans toutes ses composantes physiques, spirituelles, psychologiques mais aussi relationnelles, dans l'espace et le temps. Jésus Christ, par les sacrements, frappe d'abord à la porte de nos sens (dont seuls le toucher et le goût sont mis en attente en ce moment). Mais par cette entrée, il convie toute notre personne à entrer dans ses propres sentiments. Et quels sont-ils ces sentiments du Christ au soir du jeudi saint ? Ce sont des sentiments d'humilité au point de se mettre à nos pieds et de se faire notre serviteur ;  des sentiments de compassion et d'amour au point de livrer sa vie pour nous ; des sentiments de Fils obéissant au point de faire la volonté du Père et non la sienne.

Si nous communions à ces sentiments du Christ, alors sa présence en nous, aujourd'hui, sera vraiment réelle.

Sr Anne-Sophie