Dieu nous prend tel que nous sommes, mais ne nous laisse pas comme nous sommes

Homélie pour la messe « Rorate » du frère Michel Fontaine

Is 45, 6b-8.18.21b-25

Peut-être l’avez-vous remarqué, le prophète Isaïe nous accompagne depuis plusieurs semaines et tout spécialement lors de nos messes dites « Rorate » : « Rorate caeli desuper, et nubes pluant justum » (Cieux, versez votre rosée, et que les nuées fassent pleuvoir le juste).

Ce passage est tiré du même chapitre 45 que nous venons d’entendre :

 Je suis le Seigneur, il n’en est pas d’autre : je façonne la lumière et je crée les ténèbres, je fais la paix et je crée le malheur. C’est moi, le Seigneur, qui fais tout cela. 

« Je fais la paix et je crée le malheur ». Avez-vous entendu ? Qui parle ? Dieu, mais comment Dieu peut-il parler ainsi ? A-t-il crée le malheur ? Où est la cohérence avec l’attente de l’Emmanuel, le Prince de la paix, avec l’Evangile, la Bonne Nouvelle ?

Comment tenir ensemble cette exaltation de la Création, acte d’Amour divin et cette Parole rapportée par Isaïe « … je fais la paix et je crée le malheur » (v.7) ?

Regardons de plus près ce court passage d’Isaïe parce qu’en fait, il nous faut l’entendre comme déjà une ouverture à la puissance de l’Evangile ; celle qui vient déplacer les codes et rappeler combien Dieu espère en l’homme…

Mais à qui parle Dieu ? Le malaise pourrait alors se poursuivre car, Dieu parle à son messie « Ainsi parle le Seigneur à son messie : Cyrus… » (v.1) dont nous découvrons l’identité, quelques versets plus hauts… c’est-à-dire Cyrus, l’empereur de Perse, conquérant, polythéiste mais respectueux des peuples, étranger au monde juif mais porteur d’une certaine tolérance. Dieu l’appelle son Christ, l’Oint. Il le choisit et l’envoie en mission selon la tradition royale de prophète, roi ou de prêtre…

N'oublions pas que cette situation est loin d’être unique dans la Bible.

Alors, que veut nous faire saisir cette parole d’Isaïe et à quoi veut-elle nous préparer, nous qui sommes à quelques jours de Noël dans un contexte apparemment si différent ?

Tout d’abord, la proclamation est claire, il n’y a qu’un seul Dieu unique, Maitre de l’Univers.

Ensuite, il n’y a pas de Dieu qui est à la fois Bon et Mauvais, Créateur du Bien et du Mal ? Non, en aucun cas.

Le Dieu d’Isaïe est le Dieu de Jésus-Christ et il nous le dit à sa manière ici en choisissant Cyrus, l’étranger, un adorateur de plusieurs dieux…

En nous rappelant qu’il est l’Unique et qu’il crée la Lumière, il nous confirme une Espérance et nous rappelle ainsi la complexité de notre existence, mélange d’ombre et de lumière qui doit composer avec nos tensions et nos contradictions. Isaïe ne craint pas de nous rappeler cette existence souvent pleine d’incertitudes et de paradoxes. C’est bien le profil de cet empereur de Perse qu’il annonce pourtant comme « son messie », son choix et c’est là que nous pressentons déjà les prémices de l’Incarnation et de la Bonne Nouvelle… Jésus dans toutes ses rencontres n’ouvre-t-il pas un chemin, un avenir… c’est la samaritaine, l’aveugle né de naissance, la femme adultère, Nicodème…

N'oublions pas que Dieu nous prend tel que nous sommes, mais ne nous laisse pas comme nous sommes.

Chacun de nous est appelé quel que soit son récit de vie. Il en a été ainsi du choix des disciples et de Pierre tout particulièrement dont nous entendons ce matin, au plus profond de nous-mêmes, cet envoi : « A qui irions-nous Seigneur, c’est toi qui a les Paroles de la Vie éternelle ».

 — frère Michel Fontaine

(photo : fr. Philippe Jeannin)

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