La rencontre de l’autre

Pierre Claverie naît le 8 mai 1938 à Alger, au sein d’une famille très unie mais sans relation réelle avec les musulmans. Comme d’autres Français d’Algérie, il vivait dans « la bulle coloniale ». En 1957, étudiant à Grenoble, il découvre la gravité de la situation en Algérie. Une lettre hebdomadaire le relie aux siens.

Son désir de vivre à fond le conduit alors chez les dominicains à Lille, où il se forme au plan intellectuel et à l’oraison. En 1959, il poursuit ses études à Paris où il a pour maîtres les pères Chenu et Congar. Ordonné prêtre en 1965, il est envoyé en 1967, à sa demande, au couvent d’Alger. Là, il apprend l’arabe, étudie l’islam et surtout fait la connaissance de nombreux amis algériens musulmans.

Nommé par le cardinal Duval directeur du centre diocésain d’études d’Alger en 1973, il y invite ses partenaires algériens pour parler des réalités politiques, sociales et économiques du pays. Il rédige des cours de théologie, enseigne l’arabe et l’islamologie, multiplie les conférences et trouve dans la prière la force d’accomplir sa mission. L’été, il prêche des retraites.

Nommé évêque d’Oran en 1981, il met en relation les chrétiens de toutes provenances avec le milieu musulman. Sillonnant son diocèse, il crée des plates-formes de rencontre où chrétiens et musulmans travaillent au service des Algériens : bibliothèques, centres de couture, accueil de personnes âgées ou handicapées.

À l’heure des extrémismes, sa parole courageuse soutient une Algérie ouverte et fraternelle. Son engagement à la suite du Christ, nourri de ces rencontres, s’exprimera aussi par sa fidélité à son peuple jusque dans sa mort. Il est tué par une bombe – avec son chauffeur Mohammed – le 1er août 1996, sang mêlé avec au moins 150 000 Algériens.

fr. Philippe Jeannin