Matinée dominicaine

Une thèse consacrée au cardinal Bea

Samedi dernier, notre communauté du couvent St-Dominique a poursuivi sa tradition de « matinées communautaires » sous la direction de notre lecteur conventuel, le frère Guy Musy.

Une matinée communautaire est un moment de conversation et d'étude pour les frères et parfois pour un petit nombre d'invités.

Habituellement, l'un des frères ou un expert extérieur à la communauté fait une présentation sur son travail, un livre récemment publié ou un autre projet qui élargit nos horizons intellectuels.

En février dernier, par exemple, nous avons entendu le pasteur Nils Phildius de l'Église Protestante de Genève qui a présenté son livre Se goûter un en dieu.

Ce samedi matin, c'est notre frère Erik Ross, doctorant à l'Université de Fribourg, qui nous a présenté une partie de ses recherches pour sa thèse concernant le cardinal Augustin Bea (1881-1968), un père du Concile Vatican II qui est largement considéré comme l'auteur principal de la déclaration conciliaire Nostra Ætate, qui traite, entre autres, des relations de l'Église avec le judaïsme.

Jésuite allemand, Augustin Bea était un exégète de l'Ancien Testament qui a été le directeur de l'Institut biblique pontifical à Rome pendant de nombreuses années.

Nos invités pour la journée étaient deux pères jésuites de Genève, les pères Joseph Hug et Bruno Füglistaller, l'abbé Côme Traoré, prêtre guinéen en service à la Basilique Notre-Dame de Genève et auteur de Juifs et chrétiens en dialogue, récemment publié aux Éditions St-Augustin, ainsi que deux membres de notre fraternité laïque dominicaine, Evelyn von Steffens et Annelise Vuillemin.

Le frère Erik a commencé sa présentation par un diaporama qui présentait une brève biographie de son sujet présentant la position d'Augustin Bea dans l'histoire de l'Église du XXème siècle.

Bea a influencé une transition dans l'exégèse biblique au sein de l'Église catholique, étant parmi les premiers à intégrer les découvertes scientifiques modernes et l'approche historio-critique dans les études bibliques catholiques.

Passionné de l'unité des chrétiens et de l'œcuménisme, Bea participait depuis les années 1930 aux réunions de biblistes protestants qui se tenaient à Göttingen en Allemagne.

L'intuition du frère Erik est que, tandis que Bea évoluait en tant qu'exégète pour devenir plus sensible des sources sémitiques et hébraïques de la culture et de la littérature de l'Ancien Testament (aujourd'hui souvent appelé de préférence « La Bible hébraïque »), il devenait également plus sensible à la culture des juifs contemporains vivant autour de lui.

Le souci de Bea d'améliorer les relations avec les églises chrétiennes s'est élargi au cours des années pour inclure le judaïsme, avec une attention particulière portée à la manière dont les juifs sont représentés dans l'enseignement chrétien.

Cette préoccupation est apparue après les événements tragiques de la Seconde Guerre mondiale et a été stimulée en partie par la célèbre conférence de Seelisberg, officiellement « la Conférence internationale d'urgence sur l'antisémitisme », qui s'est tenue à Seelisberg, dans le canton d'Uri, en 1947.

Cette conférence, qui a réuni des penseurs catholiques tels que Charles Journet, une importante délégation protestante et plusieurs penseurs juifs, dont l'historien français Jules Isaac, a dressé une liste de dix recommandations à l'intention des chrétiens afin qu'ils évitent d'instiller des sentiments antisémites parmi les fidèles ou ce qu'Isaac a appelé « l'enseignement du mépris ».

Ces recommandations (appelées les « dix points ») comprennent : « Rappelez-vous qu'un seul Dieu nous parle à travers l'Ancien et le Nouveau Testament » et  « Évitez de déformer ou de mal représenter le judaïsme biblique ou post-biblique dans le but de vanter le christianisme ».

Frère Erik a partagé une copie des recommandations de Seelisberg avec chaque membre du groupe et nous a ensuite demandé de comparer ces points avec la déclaration Nostra Ætate, un document du Concile Vatican II qui a été publié 18 ans plus tard, en 1965.

Les participants ont pu constater plusieurs résonances entre ces deux documents qui ont contribué à réorienter la manière dont l'Église parle du peuple juif dont le Christ est issu.

Nous avons également pu, avec le frère Erik, repérer plusieurs lacunes dans ces documents, qui ne sont pas des fautes mais qui représentent des domaines à développer. Selon frère Erik, ces domaines doivent être traités par les théologiens de notre époque en vue de faire advenir une meilleure compréhension entre juifs et chrétiens.

La présentation et la discussion, qui ont duré environ une heure 30, ont été suivies d'un moment convivial et d'un verre d'amitié entre les frères et leurs invités.

Nous sommes reconnaissants au frère Erik qui, avec un enthousiasme évident, nous a expliqué certains des grands thèmes liés à sa recherche doctorale. Nous encourageons le frère Erik et nous lui souhaitons une bonne continuation dans sa recherche.

Le cardinal Augustin Bea (image : Pinterest)

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