Témoins d’espérance

Homélie du fr. Philippe Jeannin pour le mercredi des cendres

Nous avons voulu placer ce carême, dans le contexte actuel déprimant que vous connaissez, sous le signe de l’Espérance… et, comme l’affirme saint Paul, l’Espérance qui ne déçoit pas.

De plus, ce thème est en harmonie avec le souhait du pape exprimé dans son message pour le Carême 2021, publié vendredi 12 février, où il invite les catholiques à être témoins d’espérance, même si cela peut sembler « provocateur » face à l’épidémie de Covid-19. Il demande en particulier d’être proches de ceux qui sont touchés par la pandémie. 

Voilà donc un chemin de Pâques – puisque notre carême est d’abord une route vers Pâques et non un parcours du combattant contre les tentations –. Essayons de voir comment les textes du jour nous invitent à nous y engager.

« Revenez à moi de tout votre cœur » invitait le Seigneur par la bouche du prophète Joël. Et pas deux fois… « Revenez au Seigneur, votre Dieu… » Nous le savons bien, la barque, le yacht ou le paquebot… s’ils ne sont pas amarrés à quai, partiront à la dérive, loin de leur port d’attache, sous les mouvements perpétuels des vagues… Notre vie aussi, si nous ne restons pas reliés au Christ, partira à la dérive : ce temps de carême nous offre un répit à bon port… Profitons-en… 

Paul nous le demande, au nom du Christ : « Laissez-vous réconcilier avec Dieu ! » Comme si nous n’avions rien à faire, juste à nous laisser faire : C’est Dieu qui fait le travail… Sommes-nous prêts à nous laisser faire ? à nous abandonner entre les mains du Père ? à nous laisser aimer, consoler, recréer par lui, dans le Christ ? Le carême est aussi ce temps où nous pouvons laisser Dieu agir en nous, sans le contrarier, sans lui dire ce qu’il a à faire… Juste nous laisser faire… 

Paul nous exhorte aussi « à ne pas laisser sans effet la grâce reçue de lui. » La saison d’hiver nous montre bien que la nature, la végétation, en hibernation, bientôt, avec le retour du printemps, se montreront plus généreuses encore… Ce temps est nécessaire, le froid aussi pour, disait-on dans les campagnes, tuer la vermine… Laissons la grâce agir en nous… discrètement, patiemment : puisse-t-elle, en nous, à travers nous, aux jours venus, offrir de beaux fruits…

Et enfin, cette page d’Évangile, bien connue, qui revient tous les ans : Quand tu fais l’aumône… Quand tu pries… Quand tu jeûnes… fais-le discrètement, dans le secret : ce n’en sera que plus efficace… Ton Père qui voit dans le secret te le rendra…  

Ces trois démarches : faire l’aumône, prier, jeûner… préparent nos cœurs et nos vies à intégrer le commandement nouveau qui donne la vie éternelle : « Maître, que dois-je faire pour obtenir la vie éternelle ? » Vous vous souvenez de cette question posée à Jésus par le légiste. Et Jésus de lui répondre : « Que lis-tu dans la Loi ? » Et lui de répondre : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta force et de toute ta pensée, et ton prochain comme toi-même. » Et Jésus d’approuver : « Tu as bien répondu : fais cela et tu auras la vie » (Lc 10, 25-27).

En effet, je retrouve dans l’aumône, la prière et le jeûne, les trois dimensions de l’amour à mettre en œuvre : Aimer le Seigneur-Dieu, et son prochain comme soi-même. L’aumône, c’est l’amour du prochain mis en œuvre dans la compassion et le partage. La prière, c’est l’amour de Dieu dans le cœur à cœur avec lui où l’on nourrit son âme, où l’on puise la force, où nos pensées sont tournées vers lui… Le jeûne, c’est le soin porté à nous-même, dans un souci de nous préserver de tout excès de chair, de la chair. Juste ce qu’il faut. Pas davantage. L’aumône, la prière et le jeûne, comme moyen pour faire grandir en nous l’amour du Seigneur, l’amour pour le Seigneur, l’amour pour nos frères, le respect pour la créature que nous sommes.

Vous le voyez, le Carême n’est donc pas un temps de repli sur soi, mais une halte au port, une pause bienfaisante pour refaire nos forces, pour renforcer l’amour en nous.

Revenir au Seigneur, notre Dieu ; nous laisser réconcilier avec lui ; laisser agir en nous la grâce ; nourrir en nous le désir de vie éternelle et faire grandir l’amour pour Dieu, pour nos frères et le respect de nous-même : quel merveilleux programme pour redonner l’Espérance, la joie, le sourire…  En être témoins : voilà ce que l’on attend de nous, les disciples de Jésus.

Bien sûr, chaque jour, mille informations nous rappellent les malheurs de ce monde, mais nous les accueillons dans le cœur et la prière, sans nous laisser atteindre ou détruire en profondeur. Au mieux, elles suscitent notre compassion, excitent notre espérance, réveillent notre foi, provoquent notre charité. Car nous le pressentons à la suite de saint Paul : 

« Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? Il n’a pas épargné son propre Fils, mais il l’a livré pour nous tous : comment pourrait-il, avec lui, ne pas nous donner tout ? … Qui pourra nous séparer de l’amour du Christ ? la détresse ? l’angoisse ? la persécution ? la faim ? le dénuement ? le danger ? le glaive ? Mais, en tout cela nous sommes les grands vainqueurs grâce à celui qui nous a aimés… Ni la mort ni la vie, ni les anges ni les Principautés célestes, ni le présent ni l’avenir, ni les Puissances, ni les hauteurs, ni les abîmes, ni aucune autre créature, rien ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu qui est dans le Christ Jésus notre Seigneur. » (Ro 8, 31-39)

Voilà notre Espérance contre toute espérance !

Alors, bon carême…

fr. Philippe Jeannin

(photo : pxhere.com)

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