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Bronzage intelligent !

  • Fr. Guy

Lectures d’été

Confiné, semi-confiné, déconfiné, allongé au bord d’une piscine ou d’un lac ou simplement étendu sur une chaise de jardin … quelques instants pour rêver ou rêvasser…

Pourquoi ne pas habiller d’une mince couche de raison ces rares moments de bienheureuse oisiveté ? Autrement dit, ne pas bronzer idiot !

Une ou deux suggestions de lectures brèves, variées et peut-être aussi plaisantes. A vous de juger et d’en tirer profit !

La Via Jacobi

Un chemin de Compostelle à parcourir à travers la Suisse. De Rorschach à Genève. Dix-huit étapes en compagnie d’un sympathique marcheur, journaliste engagé dans nos médis catholiques romands. Un compagnon agréable et curieux, qui s’extasie devant tout ce qu’il découvre : paysages, tables d’hôtes, rencontres inopinées ou convenues (celle de Claude Ducarroz ou de Jean-Bernard Livio), histoire passée et récente des lieux, détails croustillants qui rendent son récit intéressant et même amusant.

Des itinéraires qui nous familiarisent avec des sites et des paysages de montages, de plateaux et de plaines, sans doute déjà parcourus à la hâte, mais qui demeurent en fait méconnus. 

Emmanuel Tagnard : Via Jacobi. Éditions Saint-Augustin, 2020, 141 pages.

Karl Barth interprète Mozart

On aurait imaginé qu’il y eut davantage d’affinités entre un théologien protestant et les chorals de Bach qu’avec la musique - frivole - du maître de chapelle de Salzburg. Erreur. A cinq ans déjà, le petit Karl fredonnait des airs de « La Flûte enchantée » que son père jouait au piano. Une fidélité et une dévotion qui ne le quitteront plus. Mozart, plaisantait le théologien bâlois, suffirait à lui seul à le combler au paradis. Il lui pardonnait même son catholicisme, équilibré sur le tard, il est vrai, par des compositions d’esprit maçonnique.

En 1956, lors du deuxième centenaire de la mort de Mozart, on éditait à Zurich quatre petits essais dus à la plume de notre dogmaticien et consacrés à son « idole ». Quatre petits chefs d’œuvre que les éditions genevoises « Labor et Fides » publient cette année en traduction française. Un véritable récital littéraire qui nous libère des poncifs et clichés trop souvent entendus et répétés dès que le nom de Mozart est évoqué. Je n’en cite que ces deux courts extraits :

Mozart Créateur jusque dans ses imitations. Il ne s’est pas contenté d’imiter. Il s’est senti de plus en plus libre dans les cadres que son époque prescrivait à son art sans jamais pourtant se révolter contre eux. Il ne les a jamais brisés, mais y est resté attaché tout en étant pleinement lui-même ; c’est en cela qu’il a cherché et trouvé sa grandeur. » (p.43-44)

« Comment parler encore de facilité ? Sa musique d’ailleurs ne se livre pas si rapidement qu’on veut bien le prétendre. Il est vrai qu’une certaine légèreté s’y manifeste. Mais elle impose malgré tout des exigences réelles ; elle contient souvent un élément d’inquiétude, je dirais presque d’excitation, même dans ses parties les plus rayonnantes de fraîcheur enfantine. Mozart réconfortera celui-là  seul qui connaît ces choses. » (p. 45-46)

Karl Barth, Mozart 1756-1956. Editions Labor et Fides, Genève 2020, 60 pages.

Charles Péguy
Espérer quand il n’y a plus d’espoir

Notre ami  journaliste, Pierre Pistoletti, eut la bonne idée de recourir aux éditions Parole et Silence pour publier un article déjà paru  dans la revue Nova et Vetera, sous le titre : « Charles Péguy. Le risque, obstinément ».

Nous savions déjà que Pierre Pistoletti se passionnait pour cet écrivain hors norme du versant des deux derniers siècles et dont il avait fait le sujet d’un mémoire universitaire.

J’ai apprécié dans les quelques pages qui composent cet ouvrage aux dimensions modestes le rappel de la biographie – trop peu connue – de Charles Péguy, marquée par des étapes de vie qui ont correspondu chez lui à des remises en questions et des conversions radicales. Depuis ce 7 janvier 1873 où il vit le jour dans une chaumière du Val de Loire jusqu’au 5 septembre 1914 qui vit le lieutenant Péguy tomber, foudroyé par une balle en plein front. Cela se passait près de Meaux, lors de la première bataille de la Marne.

Ce fil rouge biographique est nécessaire. Non seulement pour situer dans leur contexte les poèmes dont les strophes viennent spontanément sur les lèvres des intellectuels catholiques de ma génération, mais aussi pour approcher ce « mystique » à la fois enthousiaste et ténébreux, dépouillé de toute ambition. « La petite fille espérance » le tenait par la main dans la nuit la plus obscure.

Pierre Pistoletti : Charles Péguy. Le risque, obstinément. Editions Parole et Silence, 2020, 72 pages.

Le retour du Grand Inquisiteur

Encore un souvenir de jeunesse. Temps lointain où je dévorais à pleine bouche « Crimes et Châtiment » et « Les Frères Karamazov ». De ce dernier roman j’avais bien sûr retenu la fameuse « légende » où Fédor Dostoïevski décrivait une surprenante confrontation dans un cachot sévillan. Un vieux cardinal inquisiteur, soucieux du peuple dont on lui avait confié la charge face à un Jésus silencieux revenu incognito, accusé de semer le trouble dans un bel appareil religieux, social et politique.

Bref, le conflit entre la liberté difficile à conquérir et à vivre et le bonheur facile à portée de main, mais au prix de la servitude et du mensonge. L’issue du conflit ne fait pas de doute : le messager de la liberté disparaît le lendemain dans un autodafé. Caïphe disait déjà : « Mieux vaut qu’un seul homme meure plutôt que la nation toute entière ». 

La leçon de cette légende dépasse assurément les frontières de l’Andalousie d’Isabelle la Catholique. Elle concerne en premier lieu l’histoire personnelle de l’écrivain, comme l’a magistralement démontré Michel del Castillo, auteur de l’introduction de l’ouvrage. Plus généralement, elle dénonce tous les systèmes totalitaires qui confisquent les allumettes de leurs sujets sous prétexte de prévenir les incendies. Ce qui arrive chaque fois que la sauvegarde de la structure prend le pas sur la vraie vie. Les lecteurs découvriront eux-mêmes les applications modernes de ce principe. Les exemples, hélas, ne manquent pas.

Fédor Dostoïevski : La Légende du Grand Inquisiteur. Présentation de Michel del Castillo. Editions Desclée de Brouwer, 2020, 74 pages. 

(photo : pxfuel.com)

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