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Guy Oberson

  • Fr. Guy

Un extraterrestre en Gruyère

Laurence Marti : Guy Oberson. Un prêtre en chemin. Histoire de vie. Edition Saint-Augustin, 2022, 147 pages.

« Prêtre en chemin ». Un titre approprié pour le récit de vie de l’abbé Guy Oberson retranscrit par une historienne-sociologue. Un prêtre « bien de chez nous », s’il en fut un seul de cette trempe au sein de sa corporation. A 84 ans, Guy se dit en excellente forme et poursuit sa « longue marche ».

Voici peu d’années, l’abbé a regagné sa Gruyère bien-aimée qu’en fait il n’avait jamais quittée. Loin d’être reclus dans la ferme parentale qui l’abrite désormais, il continue à courir les Vanils, bénit les croix plantées sur les sommets ou dans les alpages, chante à tue-tête dans les églises et chapelles du voisinage, célèbre, baptise à tour de bras, tout en ne cessant pas d’unir en « justes noces » les enfants et petits-enfants de ses vieux amis. Et, last but not least, il s’est remis au patois gruyérien, la langue maternelle de ses parents.

Il ne m’est arrivé qu’à de très rares occasions de croiser ce prêtre exceptionnel. Pourtant, je me sens proche de lui par l’âge, par nos prénoms communs et surtout par nos origines fribourgeoises, y compris le Collège St-Michel que nous avons tous deux fréquenté. Puis vint le jour, il y a fort longtemps, qui vit nos itinéraires bifurquer : le sien vers le Grand Séminaire diocésain de Fribourg et le mien à la porte d’un couvent de Dominicains de la même ville. J’avais vraiment besoin de ce livre pour le connaître.

Un peu pour dévoiler nos contrastes, je l’avoue. Autant mon homonyme est un passionné d’épreuves et de compétitions sportives, de football en l’occurrence, autant il adore le travail manuel, autant je suis nul et inapte en ces deux catégories. Ce qui lui donne un avantage certain sur moi : le contact facilité avec les plus jeunes et l’estime des travailleurs manuels dont il partageait la peine sur les chantiers. Cet horizon était aussi celui de son « ministère » de prêtre. Une évangélisation qui passait par sa seule présence amicale et engagée dans un univers où le prêtre était encore un personnage respecté.

Mais notre abbé ne boude pas la réflexion intellectuelle, théologique ou biblique. Guy Oberson a souci de se « recycler », de s’informer aux meilleures sources et même de s’appliquer à la lecture de notre frère dominicain belge Ignace Berten. Même s’il préfère une prédication « participative » à un sermon interminable, intemporel et, pour tout dire, soporifique.

Faut-il s’étonner si sa hiérarchie a reconnu les charismes de Guy et qu’elle lui a confié l’aumônerie de plusieurs mouvements autrefois bien vivants, comme la « Jeunesse Ouvrière Catholique » (JOC), l’« Action Catholique Ouvrière » (ACO) ou la « Pastorale du Monde du travail » ? Un changement profond de notre société, mais aussi de notre Eglise, a rendu caduc ce genre d’organismes. Ce qui n’empêcha pas l’Abbé Oberson de retrouver chaussure à son pied. En effet, de 1997 à 2005, il fut curé de la paroisse de Renens dans l’Ouest lausannois, un secteur administratif peuplé d’immigrés et de requérants d’asile et qui traditionnellement vote tout à la gauche de l’échiquier politique suisse. On ne sera donc pas surpris que ce soit Madame Huguenin, ancienne syndique de Renens et membre du POP (Parti Ouvrier Populaire), qui postface cet ouvrage. Elle salue celui qui fut reconnu dans sa commune comme un champion de l’intégration sociale.

Ces diverses affectations n’ont pas ébranlé la foi simple, solide et profonde de notre ami. Il reste ce qu’il a toujours été, répondant à tous les appels qui actualisent l’appel fondamental qu’il reçut au jour de son ordination sacerdotale le 29 juin 1964 à Bulle. Bien loin d’être enfermé dans un regret nostalgique du passé de son Eglise, Guy Oberson reste très ouvert à une Eglise dont les prêtres seraient des hommes et des femmes, mariés ou non, disposant d’une activité professionnelle annexe. Avec comme complément pour des services régionaux ou spéciaux des groupes de célibataires – volontaires – totalement donnés à leur mission.

Serais-je éloigné de la pensée de Guy Oberson si je disais que ce service auxiliaire existe déjà dans l’Eglise. Celles et ceux qui s’engagent dans la vie dite « religieuse » devraient être capables de l’assumer. En collaborant de près avec les responsables des paroisses, insérés les uns et les autres dans le même peuple de Dieu.

Ce livre, un « récit de vie » ? Bien davantage. Un apport à la réflexion synodale en cours.

© Éditions Saint-Augustin

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