Harmoniques

Maurice Zundel, Harmoniques. Œuvres complètes. Tome II, Ecrits de décembere 1935 à 1939, Editions Parole et Silence 2019, 632 pages.

Faire paraître la même année deux tomes des Œuvres Complètes de Maurice Zundel (1897-1975) tient de l’exploit. Il aura fallu le zèle et l’intérêt de l’Abbé Marc Donzé qui depuis des années se passionne pour l’œuvre de ce prêtre de son diocèse. Ce travail acharné nous vaut donc aujourd’hui un deuxième volume contenant les écrits et les conférences de Maurice Zundel de la période qui s’étend de 1935 à 1939.

Ce que nous savons de la vie de l’auteur au cours de ces quatre années est tout simplement affligeant. Mgr Marius Besson, son évêque, a finalement exilé hors de son diocèse ce prêtre qu’il jugeait marginal et dérangeant. Il l’astreint tout d’abord à remettre ses idées en place à l’Angelicum, une université romaine dominicaine où le pauvre Abbé qui ne rêvait que de vie paroissiale s’infligea le pensum d’une thèse sur le nominalisme rédigée à l’ombre du Père Garrigou Lagrange, une des gloires thomistes de ce temps. Cette épreuve ne lui permettra pas pour autant de retourner vivre dans son diocèse. Son évêque le condamne à l’exil français, où l’Abbé se contentera de ministères alimentaires auprès d’institutions religieuses qui lui concéderont quelques heures de catéchèse ou un rôle de vice-aumônier dans leur établissement.

Cette pauvreté et cette humiliation seront finalement fécondes. Elles donneront lieu à trois ouvrages de Zundel : Notre-Dame de la Sagesse (1935), L’Evangile intérieur (1936) et Recherche de la personne (1938). Marc Donzé nous livre les circonstances et le contexte de chacune de ses publications qui vont faire connaître leur auteur ou étendre son renom. Si la parution des deux premiers livres ne soulève aucun problème, le troisième provoque l’ire de l’évêque qui craignait pour la chasteté de ses prêtres et séminaristes. Ils auraient pu être scandalisés par les lignes de Zundel. A cette époque, il est vrai, ce genre de propos n’était réservé qu’aux manuels de morale rédigés en latin. Ne pouvant obtenir du Saint-Office une mise à l’index de l’ouvrage, l’évêque dut se contenter d’une interdiction visant une éventuelle seconde édition. De fait, le livre ne sera réédité qu’en 1990, quarante-cinq ans après la mort de Mgr Besson.

Ces lignes paraissant sur un site dominicain, il pourrait être intéressant de relever le rôle positif qu’ont pu jouer quelques frères prêcheurs de cette époque dans la parution de ces ouvrages. On y découvre les noms du Père Moos, du Père Lavaud et, bien sûr, celui du Père Vincent Bernardot qui fera éditer au Cerf Notre-Dame de la Sagesse et offrira à Zundel l’hospitalité de son hebdomadaire Sept.

Il ne reste plus qu’à souhaiter longue vie à Marc Donzé pour la poursuite et l’achèvement de son œuvre colossale. Maurice Zundel étant décédé en 1975, trente-cinq années de publications de cet auteur sont encore à rassembler avant de mener à terme ses Œuvres Complètes.

Bon courage et merci, cher Marc !