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Le sage et la croix

  • Fr. Guy

Un conflit sans fin

Je relis ces jours un chapitre extrait de « L’Enfant d’Agrigente » du Père Festugière (1898 – 1982), paru au Cerf en 1974 dans la collection « Foi Vivante », intitulé : « Le sage et le saint ». Le texte original avait été édité en 1950.

Surprenante actualité de cet écrit qui n’a pas pris une ride en soixante dix ans. Le style est haché, percutant, va droit au but, sans fioritures. L’auteur assure lui-même la traduction des versets bibliques cités. Une version originale, déroutante qui nous fait sortir des chemins battus.

Dans la première partie de cet ouvrage, le Père Festugière se pose une question classique : Pourquoi les Athéniens assemblés à l’Aréopage n’ont pas reçu la prédication de Paul, alors que les Corinthiens lui ont fait bon accueil ? La réponse est obvie. Comment annoncer le Christ crucifié à ceux que la vie terrestre comble à satiété ? Non pas indifférence de leur part, mais curiosité d’intellectuels ou d’esthètes face aux « nouveautés » annoncées par cet étranger. On jouit un instant du spectacle qu’il en donne, puis on retourne à ses affaires, autrement plus sérieuses.

« Ce n’est pas un détail de doctrine qui arrêta les sages ou leurs disciples. C’est le fond même de leur âme qui les empêche d’accepter. Car l’Evangile ne peut entrer que dans des âmes vides, démunies ; dans des âmes qui ont d’abord le sentiment de leur mal et qui, dès lors, attendent, appellent un guérisseur. Or, tous les tenants de la sagesse croyaient posséder le remède. En sorte qu’ils écoutaient en dilettantes, curieux sans doute, prêts d’avance à s’amuser, non pas en hommes de désir. Paul, à leurs yeux, pouvait bien apporter « une » sagesse de plus : belle matière à disputer, rien au-delà. » (p.14)

Festugière rapproche le refus des Athéniens du recul du jeune homme riche dont parlent les évangiles. Le contexte est assurément différent, mais au final le jeune homme s’en va parce qu’il avait de grands biens. Une parole de Jésus éclaire cette scène : « Je ne suis pas venu pour les bien portants, mais pour les malades ».

Aujourd’hui, la situation est encore plus grave. En Occident du moins. Pour la majorité de nos contemporains, le discours chrétien n’éveille plus guère d’attention. On l’entend, mais sans l’écouter. On ne s’y attarde pas pour en discuter. Il ne fait même plus rire. Il est devenu littéralement insignifiant.

Le langage de la croix s’est-il dilué dans l’amas des bonnes recettes ringardes ? Le sel a-t-il perdu sa saveur ? Comment lui restituer son goût et son usage ?

Un triptyque de vitraux (cliquez pour agrandir l'image) représentant Saint Paul prêchant à Athènes, John La Farge, 1907. La chapelle Saint-Paul de l'université Columbia à New York (image : Boston College Library, library.bc.edu)

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