Les dominicains et la BD

Avec l’éditeur Glénat, bien connu des bédistes, les Editions dominicaines du Cerf se lancent dans une entreprise inhabituelle : la publication d’une série de huit BD consacrées chacune à la figure d’un pape qui aurait marqué son époque.

Les deux premières viennent de paraître : la toute première - A tout seigneur tout honneur ! - est dédiée à Pierre, le premier de la liste. Elle est intitulée : Saint Pierre. Une menace pour l’empire romain et la deuxième à Léon le Grand, celui-là même qui en 452 défia Attila aux portes de la ville de Rome.

Sans respecter l’ordre chronologique, on annonce déjà pour la fin de cette année la parution de deux autres titres dont on conviendra l’hétérogénéité : Alexandre VI. Le règne des Borgia  — et —  Jean-Paul II. N’ayez pas peur.

Plus contrasté, tu meurs !

Profitant de la trêve bienvenue qui fait suite aux turbulences pascales, j’ai lu avec intérêt et même avec plaisir les deux premières productions. Bien sûr, il faut faire la part du romanesque inévitable à ce genre, mais aussi - ce qui est plus rare - celle du sérieux de la documentation.

L’album consacré à Pierre débute par la fameuse citation de Tacite relative à l’incendie de la ville de Rome et fourmille de références aux évangiles canoniques. On doit au journaliste historien Bernard Lecomte la rédaction d’un feuillet en fin de chaque volume qui reflète avec dates et documents à l'appui le contexte de vie du pape en question.

A qui s’adressent ces BD ? « A tout public », disent les éditeurs qui ne manquent pas d’enthousiastes. Je dirais plutôt à « un public averti », familier de la trame des évangiles pour suivre la trace de Pierre. Et je souhaite à ceux qui veulent découvrir le pape Léon de ne pas se perdre dans les intrigues subtiles d’une cour impériale décadente ni dans les méandres des conciles et des hérésies du 5^èmesiècle. Surtout, qu’ils ne s’embourbent pas dans les marais où pataugent de multiples hordes de barbares aux noms étranges.

Je n’offrirai donc pas spontanément ces BD à un ado de la génération smartphone avec l’espoir de l’initier à la culture catholique.

Mais qu’en sais-je, après tout ? A défaut du scénario, il se laissera peut-être séduire par la qualité du dessin qui l’amènera ensuite à s’intéresser à l’intrigue. Les voies du Seigneur, dit-on, sont impénétrables.