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Le chagrin et la joie de Madeleine

  • Fr. Guy

Au jour de sa fête

Ah ! Madeleine pourquoi donc as-tu pleuré ?
Quelle douleur a fait si rouges tes yeux ?
Deuil et tristesse de ton âme ont transpiré
Tu te lamentes quand chacun est joyeux

Non, si cette Madeleine-là pleure, ce n’est pas parce qu’« on a enlevé son Seigneur et qu’elle ne sait où ils l’ont mis » (Jean 20,13), mais simplement (?) parce que Pierre, son promis, est parti pour l’alpage sans lui dire au-revoir. C’est ainsi que l’Abbé Joseph Bovet (1879-1951), dénommé « le barde fribourgeois » lie consciemment ou inconsciemment deux événements dont les sources lui sont familières : l’évangile et sa Gruyère natale.

A vrai dire, l’une et l’autre Madeleine sont redevables à une autre amoureuse célèbre, celle qu’on nomme « la fiancée » dans le Cantique des Cantiques, qui court et s’agite à la recherche de « celui que son cœur aime ».

Comme Marie de Magdala qui s’en prend au jardiner du cimetière, la fiancée du Cantique questionne « les gardiens de le ville » pour l’aider à rejoindre son bien-aimé. Fausse piste pour l’une et l’autre. Seul l’aimé se révèle à celle qu’il aime. Il suffit que Jésus appelle par son nom la Magdaléenne pour que son chagrin s’envole et qu’elle soit retournée. De même aussi, seul le retour de l’armailli auprès de la Madeleine de la chanson devrait suffire à sécher les larmes de la gruérienne.

Quelle bonne nouvelle que cet amour toujours offert, même après déceptions et désespérances. Davantage qu’un rêve, davantage qu’un mirage : la certitude d’un retour à la joie de la présence.

Certains se moqueront de ces propos qu’ils prendront comme une autosuggestion digne du docteur Coué. Je la préfère de toute façon à la légende d’une Madeleine imaginaire pleurant ses péchés. Une image machiste tenace, ignorée des Ecritures, qui fait ployer l’échine des femmes sous le poids des forfaits commis par les mâles. L’histoire récente a mis au jour des institutions réputées hélas « catholiques », érigées sous le vocable d’une Madeleine pénitente, qui enfermaient, avec l’accord de leurs familles, des filles-mères contraintes à de durs travaux de lessivage. Façon de leur faire expier leurs péchés, avec la fiction d’une sainte pénitente comme modèle.

Que l’on me comprenne ! Je ne dis pas que je n’ai pas besoin de repentance. Mais j’irai plutôt chercher mes modèles de pénitents repentis du côté de Pierre ou de Paul qui ont sur ce sujet des expériences personnelles à faire valoir. De plus, leur péché et leur conversion sont dûment mentionnés dans le Nouveau Testament. Pour élever ce débat et non pour le clore, Paul n’a-t-il pas écrit dans sa lettre aux Romains : « Là où le péché a abondé, la grâce a surabondé » ?

Il est donc temps de réhabiliter Marie de Magdala, l’« apôtre des apôtres » du matin de Pâques. Le pape François l’a bien compris. Il a décidé de faire de ce 22 juillet une fête universelle en son honneur.

Marie-Madeleine, Tilman Riemenschneider, vers 1490. Musée national de Bavière. (image : Wikimédia. Ce fichier est sous licence Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported.)

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