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Marius Dion

  • Fr. Guy

J’avais un camarade

Au retour de la course d’école annuelle organisée par notre opulente commune de Cologny pour ses aînés déplumés, me parvient la nouvelle du décès du cher frère dominicain Marius Dion. Il s’est éteint à Montréal dans une résidence proche de notre couvent St-Albert. Contraint de regagner son Québec natal, puisque son état de santé ne lui permettait plus de résider au Rwanda. Il avait passé quelques cinquante ans dans ce pays d’adoption. Cette nouvelle me blesse le cœur, réveille des souvenirs et suscite ma reconnaissance.

Marius m’accueillit à Butare en septembre 1970 et ne cessa d’être mon compagnon sur les routes du Rwanda jusqu’à mon retour au pays en 1989. Nous avons vécu ensemble les heures tragiques du pogrom ethnique de 1973 qui frappa l’Université Nationale du Rwanda (UNR) fondée par les dominicains où nous étions actifs l’un et l’autre. Puis, ce fut notre installation (?) dans le quartier populaire de Biryogo à Kigali avec l’aventure du « Club Rafiki » et tous les engagements qui en découlèrent et donnèrent à notre vie un cours que ne prévoyait certainement pas notre formation initiale dominicaine.

J’ai connu un Marius profondément amoureux du Rwanda et de sa culture dont il connaissait les expressions les plus recherchées comme les plus familières. Mais c’était avec son peuple qu’il était le plus à son aise, avec les plus pauvres de préférence qu’il pouvait écouter des heures durant. Rien de ce qui était rwandais ne lui était indifférent ou étranger.

Il faut reconnaître que Marius était doué d’un tempérament optimiste qui lui permettait de passer serein et même positif à travers les pires obstacles. Sous les apparentes d’une fausse naïveté, il trouvait la force d’avancer sans désespérer.

J’avais déjà quitté le Rwanda quand, en 1994, avec Didier, un frère dominicain suisse, Marius donna la plus haute preuve de son attachement au Rwanda. Il refusa d’abandonner nos frères rwandais, alors que sévissaient massacres et génocide. Je me souviens de ces « petites fleurs de résurrection » qu’il avait cueillies après le drame dans le jardin dévasté de son couvent de Kigali et qu’il me fit parvenir à Genève. Elles furent alors pour moi symbole d’espoir et germe de résurrection.

Marius a été privé de la consolation du missionnaire de mourir là où il avait aimé vivre. Sans doute une grande souffrance, même si sa famille et les frères de « La Belle Province » accueillirent avec bienveillance et charité cet ancien combattant fatigué.

Quand je pense à Marius, trottent dans ma petite tête les premiers vers d’un vieux lied allemand. Décalés bien sûr de l’événement que je rapporte, ils révèlent cependant ce que Marius fut pour moi au cours de mes années rwandaises:

Ich hatt’ einen Kameraden,
Einen bessern findst du nit !

 

Frère Marius Dion (photo : dominicains.ca)

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