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« Petit pays »

  • Fr. Guy

Oasis perturbée au cœur de l’Afrique

De père français et de mère rwandaise tutsie réfugiée au Burundi, le jeune Gaël Faye vivait en paix avec ses copains métis dans un quartier huppé de Bujumbura peuplé de villas cossues habitées par des expatriés. Une joyeuse bande de petits lurons faisant les quatre cent coups dans le voisinage, tout en fréquentant une école internationale. Un père nourricier souvent absent et une mère qui ne l’était pas moins, tant son esprit la ramenait au Rwanda et consommait le reste de son temps en rencontres frivoles avec des « copines » de même acabit. Un couple mal taillé qui finira par se déchirer.

Gaël avait une douzaine d’années quand les « événements » semèrent le trouble dans son oasis privilégié, lui révélant du même coup la réalité du pays qui jusqu’alors l’enchantait. Le Burundi et le Rwanda – ces faux jumeaux, comme le constatera un jour Gaël – étaient en proie à des turbulences politiques et ethniques, guerrières et sanguinaires, dont l’horreurs atteint son sommet en 1994, lors des massacres et du génocide rwandais. Gaël avait alors douze ans. Sa mère perdit sa famille mais aussi sa raison au cours de ce désastre.

 

Rapatrié en France, Gaël eut la chance de poursuivre de bonnes études et surtout de donner libre cours à ses talents musicaux, mais aussi littéraires. En 2016, il publiait son premier livre chez Grasset : « Petit pays ». Un bestseller dont la vente dépassera le million d’exemplaires et lui vaudra plusieurs prix. Et voici qu’en août 2020 on assiste à la sortie d’un film de même titre réalisé par Eric Barbier qui met en scène le roman autobiographique paru quatre ans plus tôt.

Gaël Faye qui a participé à la rédaction du scénario du film a précisé à sa sortie que son livre avait un fond autobiographique mais ne manquait pas pour autant d’éléments romanesques. Gaël avoua aussi qu’il avait eu du plaisir à l’écrire mais qu’il restait sans voix face aux scènes d’horreurs mises en scène par le film. Etonné de la violence que pouvait contenir son récit sans même qu’il ne le soupçonnât. Choqué aussi par les violences familiales rapportées par le film qui réveillaient sa souffrance d’enfant et d’adolescent.

« Petit pays », pour des motifs politiques, n’a pu être tourné au Burundi, là où son héros a grandi, mais au Rwanda où il a choisi de vivre aujourd’hui. Frères jumeaux, souvent rivaux et ennemis, ces deux pays, vrais joyaux de la nature et de la culture africaines, avaient tout pour vivre dans la paix et la sérénité. Leur triste histoire atteste hélas combien il est difficile d’accepter la différence et la singularité de l’autre. C’est aussi le drame des métis, exclus des deux groupes humains d’où ils proviennent. Ce pourrait être aussi le drame personnel de Gaël. L’écriture et la musique devraient l’avoir sauvé.

Gaël Faye en concert sur la scène Cabaret lors du Festival du Bout du Monde à Crozon dans le Finistère (France). Image : Wikipédia / Thesupermat, license CC BY-SA 3.0

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