Quand l’Eglise s’effondre…

L’auteur du livre qui porte ce titre est bien connu dans l’univers dominicain franco-suisse. Jacques-Benoît Rauscher est un frère prêcheur qui résida plusieurs années au couvent St-Hyacinthe de Fribourg avant de devenir père-maître des jeunes profès et assistant à la chaire d’éthique de la Faculté de théologie de l’université de Fribourg. Depuis quelques mois, ses supérieurs religieux lui confièrent la responsabilité de la formation intellectuelle et théologique des frères dominicains de France, tout en l’assignant à Lyon où il assume encore un enseignement aux Facultés théologiques de cette ville.

Cet ouvrage dont le titre exact est. « Quand l’Eglise s‘effondre. Petit itinéraire spirituel (malgré tout) » a paru aux Editions du Cerf cette année 2023. Resté sur ma table pendant des mois, j’entreprends sa lecture au moment même où paraît un rapport officiel sur les abus sexuels et d’autres natures, commis en Suisse par des responsables de mon Eglise au cours des 75 dernières années. Une lecture accablante, mais non désespérante.

Je présume que cet opuscule de 150 pages a d’abord servi de notes de retraite spirituelle à une communauté dominicaine française prise sous le même feu que celui qui embrase aujourd’hui la Suisse catholique. L’auteur relit dans cette perspective et ce contexte ténébreux certains épisodes de la vie du fondateur des Prêcheurs qui resta debout, au-dessus de la mêlée, alors que l’Eglise de son temps menaçait elle aussi de s’écrouler pour des motifs assurément différents de ceux qui entraînent sa chute aujourd’hui. Ce qui nous vaut de l’auteur une série de récits exemplaires issus de la tradition dominicaine qu’il serait vain d’imiter à la lettre, mais susceptibles de nous aider à tenir debout nous aussi au milieu des gravats qui nous encombrent.

Au-delà du propos lui-même, il y a la personne qui le formule, le frère Jacques-Benoît. Il s’est livré tout entier dans ces quelques pages, exprimant sa honte, mais aussi sa foi insubmersible. Avec vérité, sans fard ni faux-fuyants. Le seul langage compatible qui dénonce et fait disparaître l’odieux scandale qui déshonore son Eglise. C’est pourquoi, je recommande vivement la lecture de cet ouvrage à ceux et celles en qui vibre encore ce qui pourrait sembler à un souffle d’espérance.

Pour reprendre courage et le raffermir, je mentionne encore sur le même sujet deux autres productions récentes, de même format que la précédente. Deux œuvres de religieux français qui n’appartiennent pas à la famille de saint Dominique.

Le premier auteur est le vénérable jésuite Paul Valadier, né en 1933, qui ne se laisse pas impressionner par la désertification des églises de son pays. Il s’en réjouirait même. On retrouvera avec plaisir son style net, clair et vigoureux dans son livre « Bienheureux sommes-nous d’être minoritaires ! Du catholicisme en France », paru chez Mame cette année 2023.

Le second auteur est le Père François Potez, né en 1955. Officier de Marine, il rejoint en 1972 la Congrégation des Frères de Saint Jean, ensuite incardiné au diocèse de Paris pour devenir curé de la paroisse de Saint Philippe du Roule. Son livre rédigé sous forme d’échanges épistolaires s’intitule « La grave allégresse. Etre prêtre aujourd’hui » a paru chez Mame. Il présente le portait d’un homme pleinement humain qui n’oublie rien des exigences et des difficultés de sa vocation.

L’éditeur a ajouté cette monition : « Un livre indispensable pour tous les prêtres et chrétiens aujourd’hui ». Je ne puis que le confirmer.