Blog

René et Christian

  • Fr. Guy

Sur les chemins de l’unité chrétienne

J’écris ces lignes partagé entre tristesse et reconnaissance. Deux retours au Père ces derniers jours. Deux témoins de l’œcuménisme à notre époque et dans nos régions. Un ancien combattant et un plus jeune militant. Le dominicain lyonnais René Beaupère (1925-2022) et le pasteur genevois Christian van den Heuvel (1947-2022).

Le premier nous quitta presque centenaire, mais sans jamais s’être trop éloigné de l’île formée par le Rhône et la Saône au cœur de la capitale des Gaules. Fils d’Irénée autant que de Dominique, sa longue vie n’eut qu’une seule passion : réunir les chrétiens dispersés et désunis.

Un prêtre avait allumé ce feu dans le cœur de René Beaupère, l’abbé Paul Couturier (1881-1953) qui fut son professeur de lycée, mais aussi et surtout l’inspirateur de la semaine de prières pour l’unité des chrétiens. Le jeune René devenu dominicain au sortir de la guerre adhéra corps et âme à cette mission. Ses entretiens avec Béatrice Soltner, parus en 2012 aux éditions Olivétan sous le titre « Nous avons cheminé ensemble. Un itinéraire œcuménique » retracent pas à pas les diverses étapes de ce parcours de longue haleine identifié à sa vie.

L’intitulé de ce livre est bien choisi. René Beaupère fut davantage un pèlerin de l’unité qu’un théologien professionnel de l’œcuménisme. Un homme de contacts, à l’affut de tout ce qui pouvait rapprocher les chrétiens désunis. Ainsi, on le trouve à Taizé, au Groupe des Dombes, organisant de multiples pèlerinages en Russie orthodoxe ou dans les pays voisins. Et même en Albanie où l’auteur de ce blog eut un jour le privilège de le remplacer, visitant et encourageant en compagnie d’un pasteur réformé et d’un groupe de pèlerins multiconfessionnels les diverses communautés chrétiennes de ce pays martyr qui se relevait avec peine de la dictature de Enver Hoxha, un potentat communiste psychopathe et sanguinaire.

Le périodique « Chrétiens en marche », créé par Beaupère, servait de fil conducteur à ces randonnées œcuméniques et en faisait le bilan.

On doit aussi au frère Beaupère l’initiative et le développement de l’association « Foyers Mixtes » qui regroupait des familles dont l’un et l’autre parents appartenaient à une confession chrétienne différente. Appelées à vivre ensemble leurs différences et à en découvrir toutes les richesses, ces familles ont connu leurs heures de gloire dans les années conciliaires. Puis, elles s’éteignirent peu à peu sous les coups de buttoir de la sécularisation et de la déchristianisation. Au point de ne former qu’une « réserve d’Indiens » perdue dans un environnement qui lui était de plus en plus étranger. Un blog de ce même site du 29 juillet 2020 a narré les heures sombres et lumineuses de cette épopée œcuménique. 

Christian van den Heuvel, lui, appartenait à une autre génération et relevait d’une autre tradition chrétienne. Mais il buvait à la même source que René et se chauffait au même foyer.

Je l’ai connu jeune pasteur à Genève dès mon arrivée dans la cité de Calvin fin 1989. Son territoire paroissial s’imbriquait dans le mien. D’où nos contacts fréquents et réguliers. Le plus souvent j’étais emporté par son zèle intempestif et sa chaleur humaine communicative. « Il aimait les gens », ainsi qu’on qualifie vulgairement une personne empathique. Et, tout naturellement, « les gens » l’aimaient. Plus que tout, il aimait prêcher. Encore un point commun qui nous rapprochait.

C’est surtout le « Cursillo » qui me fit découvrir Christian. Une retraite de quatre jours, animée et dirigée par des laïcs, selon un cadre et un schéma précis, et qui réservait au « clergé », une place particulière. Le « Cursillo », né en Espagne, avait traversé l’Atlantique, puis regagné l’Europe, devenu œcuménique au cours de cette seconde traversée. Christian s’y donnait totalement, amenant ses propres paroissiens à vivre avec leurs voisins catholiques une expérience spirituelle inédite.

Aujourd’hui, le Centre Saint-Irénée du père Beaupère n’est plus et le « Cursillo » francophone genevois s’est éteint. Mais ces deux institutions survivent dans le cœur de ceux et celles qui les ont fréquentées. Comme Jean-Baptiste, René et Christian ont aplani le chemin de l’unité qui doit venir. Rien désormais ne sera plus comme avant. L’héritage de ces deux témoins n’appartient pas au passé. Il ouvre à l’œcuménisme une porte qui ne se refermera plus.

(image : diocesemontreal.org)

Retour

Commentaires

×

Veuillez renseigner ce champ.

Veuillez renseigner un nom valide.

Veuillez renseigner ce champ.

Veuillez renseigner une adresse email valide.

Veuillez renseigner ce champ.

Google Captcha Is Required!

Vous avez atteint la limite de commentaires !

* Ces champs sont requis.

Soyez le premier à commenter