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Repentance et conversion

  • Fr. Guy

Réflexions en marge d’un fait odieux

 Les pères ont mangé des raisins verts et les dents des enfants sont agacées. 

Ce verset biblique (Jérémie 31,29) me revient en mémoire lorsque l’actualité de ce mois met en vedette et en manchettes la macabre découverte de cadavres d’enfants « autochtones » confiés par l’Etat canadien à une institution catholique, voici quelques décennies.

Mon intention n’est pas de procéder ici à une enquête et encore moins d’accuser quiconque, mais au delà de la stupéfaction et du dégoût que m’inspire cette nouvelle je voudrais faire entendre qu’il s’agit là d’un fait hélas récurrent et universel.

Il y a quelques années, un rapport fameux[1] a dénoncé la complicité – occulte – de mon pays avec le régime nazi. Je suis persuadé que la majorité de mes concitoyens de ce temps-là ignoraient ces faits. Une minorité toutefois les approuvait et une autre minorité les dénonçait en accueillant clandestinement à nos frontières des juifs qui fuyaient les camps de la mort.

De même, il a fallu attendre ce vingt et unième siècle pour débaptiser des places publiques au milieu desquelles s’élevait la statue d’un marchand d‘esclaves africains dont les profits avaient enrichi et embelli sa ville natale. Personne n’y voyait mal à l’époque.

Ceci dit, je ne suis pas certain que la société contemporaine fasse preuve d’un sens moral plus affiné. Elle a tout de même « inventé » les génocides dont je me refuse à établir la liste de peur d’en oublier un. Et quelle accusation porteront contre nous les générations qui nous survivront ?

Reste que nos dents sont « agacées » par les fautes de nos pères. Nous ne sommes pas responsables de leur conduite, mais nous en portons les conséquences. Notre silence pourrait accréditer leurs malversations pour ne pas dire leurs crimes. Alors que faire ?

« Repentance », bien sûr. Mais comment éprouver un sentiment personnel de contrition pour une faute que je n’ai pas commise ? Repentance alors du groupe social auquel nous appartenons, nous et nos « pères » ? Un groupe qui a pu tolérer autrefois des comportements qu’il désavoue aujourd’hui. Pourquoi pas ? Mais comment éviter de faire sur ce sujet des déclarations publiques qui ne coûtent rien et demeurent inefficaces ?  

Alors des « réparations », financières surtout ? Elles sont possibles et nécessaires quand les victimes survivent et si leurs descendants souffrent encore des injustices qu’ont subies leurs ancêtres.

Plus que tout, s’impose l’exigence d’une « conversion » de nos mœurs individuelles et sociales. En l’occurrence, comment accueillons-nous aujourd’hui les « autochtones » de partout qui frappent aux portes de nos églises ? Comment respectons-nous les étrangers qui ont trouvé chez nous une terre d’asile ?

Mieux vaut s‘atteler activement à faire advenir maintenant un monde fraternel et juste que verser des larmes hypocrites sur un passé, assurément odieux, qu’on espère ne plus voir venir.

Prévenir vaut mieux que guérir !

 


[1] Commission Bergier 1996 -2001

J. M. W. Turner, « Le lac de Buttermere, avec le parc de Cromackwater, Cumberland, une pluie d'eau », vers 1797-1798 (image : The Athenaeum; the-athenaeum.org. Cette image est sous licence internationale Attribution-ShareAlike 3.0 Unported (CC BY-SA 3.0))

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