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Voir Naples et mourir !

  • Fr. Guy

Ou l’éveil d’une vocation

« Voir Naples et mourir ». On attribue à Goethe ce cri admiratif. Naples était si belle en son temps que l’on pouvait mourir après l’avoir vue. 

Ce n’était pas l’avis de l’écrivain australien Morris West (1916-1999) qui après l’avoir parcourue dans les années 50 du siècle dernier comparait la reine de la Méditerranée à un immonde cloaque où grouillaient dans ses rues et ruelles les « scunizzi », littéralement, les enfants sans logis.

Morris West a relaté cette sombre découverte dans un livre fameux: « Children of the sun », Ce livre, paru en 1956, fut abondamment réédité et traduit. La version française parue chez Plon en 1963 sous le titre « Les enfants du soleil » est accompagnée d’une postface du traducteur qui vérifia sur les lieux l’authenticité des faits rapportés par Morris West.

C’est un prêtre exceptionnel qui avait attiré à Naples notre écrivain catholique, déjà rendu célèbre par la publication de bestsellers comme « L’avocat du diable » ou « Les souliers de Saint Pierre ». Morris West tenait à rencontrer personnellement dom Mario Borelli (1922-2002) qui avait entrepris à Naples une œuvre extraordinaire visant à héberger les enfants de rues et à les préparer à une vie adulte active sans dépendance. Sa pédagogie était basée sur le respect et la liberté de ces jeunes, refusant de les embrigader ou de les encaserner. Mario Borelli était un homme d’Eglise qui faisait preuve d’une ouverture et d’une liberté de penser et d’agir peu commune chez les clercs de son époque et de son milieu.

Si je déterre cette histoire ancienne, c’est parce qu’un de mes vieux amis vient de me confier que la lecture du livre « Les enfants du soleil » résonna en lui comme un appel impérieux à se donner tout entier aux enfants des rues. Mario Borelli devenait son modèle.

Depuis ce jour-là, mon ami franchit tous les obstacles et entraves mis sur le chemin de sa « vocation », jusqu’au moment où il put enfin réaliser son rêve. Cela se produisit au Rwanda à la fin des années 80. Cela aurait pu aussi bien se passer à une autre époque et sous d’autres cieux. Mais, me confiait-il, la Providence en avait disposé ainsi. Il avait largement dépassé la cinquantaine quand il se lança dans cette aventure. Malade et âgé, il en vit encore aujourd’hui.

L’histoire de cette vocation m’interroge. Tout d’abord à cause de la fidélité indéfectible et indéracinable de mon ami à son appel. Une étincelle à son départ, un « coup de foudre », pour parler la langue des amoureux. Le plus surprenant est que cette décision subite ne fut pas le fruit d’une lecture d’évangile ou d’un discernement après dix ou trente jours d’exercice spirituel. Elle tomba du ciel comme un éclair, après la lecture d’un livre relatant des faits et des situations éloignés de ce que vivait alors mon ami. L’étincelle a peut-être rencontré un tissu inflammable. Des prédispositions rendaient son cœur perméable à ce genre de vocation. Je ne sais.

Par contre, je sais par expérience que les aventures de ce genre ne sont pas rares. Il suffit de relire sa vie pour s’en apercevoir. Une étincelle jaillie inopinément peut allumer un grand feu qui vous embrase pour longtemps.

Une vue générale de Naples (photo : Flickr/N i c o l a. Cette image est sous licence internationale Attribution 2.0 Generic (CC BY 2.0)).

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